Mercredi 5 janvier : Ain Berda (Tente de chantier) – Cap Barbas 130 km

Réveillée avant les aurores ! Ah, je peux vous dire que la prochaine fois que je voyagerai avec quelqu’un, la première question que je lui poserai sera  celle qui correspond aux rythmes du sommeil. Je veux bien me lever tôt mais à l’heure dite pas la peine de bouger une ou deux heures avant.

Voilà, donc parti relativement tôt, avec le lever du jour. Et le vent… On nous avait promis un bord de mer avec vent favorable, on ne l’a pas encore vraiment connu.

Donc, ce matin, j’ai parcouru plus de 50 km dans le vent, à 12/14 à l’heure… Je n’aime pas les étapes où il faut faire du km. Cela veut dire que je n’ai pu me remplir de désert comme les autres jours. Le paysage était magnifique juste après le départ, tout en sable blanc, parterre de plantes grasses rouges, ciel embrumé, sur fond de mer émeraude, des effets que je n’ai pas encore rencontrés depuis le début du périple.

Je prends quand même quelques photos en roulant.

 Ces plantes, ont dû virer du vert au rouge, elles sont maintenant fleuries. Je n’en connais pas le nom.

Quand elles s’estompent, ce sont des touffes d’herbes vertes qui occupent le terrain. Pas de dunes apparentes. On passe encore une barre de petite montagnes. L’Adrâr Souttouf, sans doute. Je les monte sans problème. Contrairement à ce que l’on imagine, le désert n’est pas plat. Cette journée encore, je pense que l’on se paye quelques faux plats montants qui tirent passablement sur les jambes.

Nous  longeons la mer les trois quart de l’étape. Sans falaise la plupart du temps. Cela veut dire, qu’elle est à portée de vue et de bain si je souhaite. J’ai choisi le vélo, je n’ai pas encore goûté à l’eau depuis le départ.

L’étape me paraît longue. La matinée m’épuise. Le vent, sans doute. Mais depuis plusieurs jours, je ne m’alimente plus normalement.  Non, pire que cela. Depuis plusieurs semaines. Seulement depuis Boujdour, c’est l’apothéose. Plus de commerce sur notre passage, plus d’hôtel, plus d’eau ou d’électricité dans les stations service. Quand il y en a. Les deux dernières, je vais dire que l’on avait un abri. C’est presque de la survie. Le plus dur, c’est pour la toilette.

Dans la journée, j’ai des envies qui me trottent dans la tête, celui de Martini ayant été satisfait, cette après midi,  c’était un Perrier menthe. Il faut dire qu’il fait de plus en plus chaud et que l’on boit de plus en plus. L’eau a ses limites.

Je vois une maison au loin, super, je me dis, on va profiter de l’ombre du mur. Alain est devant, il a la même idée que moi. Mais à peine descendu de vélo, un monsieur l’accueille et le fais rentrer chez lui. Zut, je suis tellement naze que je n’ai pas envie de faire la causette et encore moins de me payer la cérémonie du thé que je ne peux boire même si ce joli couple est très sympathique. Ils sont partis pour nous faire un tagine d’antilope ! Ouf, j’échappe au pire. Cela n’est pas bien, je sais, mais on ne peut pas faire une grande étape de vélo et vivre à côté du peuple sahraouis, il faut faire des choix. En plus, j’ai besoin d’un temps de récupération.

Nous redémarrons en pleine chaleur, je me dis que c’est dingue de rouler de cette manière. Comme souvent après manger, je mets mon turbo en marche et c’est parti, je traverse le vent ou ce qu’il en reste, dans ces instants là, rien ne peut m’arrêter. J’ai dû tenir une bonne dizaine de km à plus de 20/25 à l’heure.

Dans le milieu de l’après midi, nous atteignons le golfe de Cintra. C’est encore une vue différente qui s’offre à nous. C’est beau, c’est sauvage, personne à l’horizon que ces deux cyclistes un peu fêlés ! C’est un terme qui revient souvent chez les gens que l‘on croise.

Bien faire et laisser dire.

Aujourd’hui, plusieurs campings cars nous  ont dépassés. Mais aucun n’a manifesté de soutien. C’est-à-dire pas de coup de klaxon, aucun signe, rien. Cela contraste avec la plupart des autres véhicules qui nous dépassent ou nous croisent. Nous sommes arrêtés quand les quatre derniers nous passent dessus. C’est drôle. Un seul homme fait signe sur les huit personnes. Nous aurions pu être en difficulté, c’était pareil.

L’après midi, nous avalons bien les kilomètres, mais peu ou pas d’information sur la prochaine station qui devrait nous permettre de passer la nuit. Peut être même d’y manger. Mon ravitaillement se rétrécit de jour en jour. Plus grand-chose à me mettre sous la dent. J’ai aussi envie d’un repas normal même s’il s’agit d’un poulet frite que je mangerai pour la énième fois.

Si l’on ne trouve pas cette station, je me dis que l’on peut aller frapper à la porte d’un camping car et dire : « Devine qui vient manger ce soir ? » Des pâtes et un œuf au plat me suffiraient ! Avec Marie Ange et Christian, oui c’est possible. Je crois bien que c’est l’exception.

A 115 km, je dis à Alain, j’en fais encore 5, et l’on arrête si on ne trouve rien mais je voudrais bien savoir à quelle distance elle se trouve la station. Je propose que l‘on arrête une voiture pour se renseigner. Je fais signe à la première qui se pointe. Ce sont des militaires, ils s’arrêtent quand même et donnent le renseignement à Alain. En plus, ils ont un GPS, ils peuvent donc donner le kilométrage exact : 12 km, cela me redonne espoir. C’est reparti, difficilement…

Un coucher de soleil magnifique ponctue la journée. Le ciel est illuminé, j’aime les scènes magiques des levers et couchers de soleil. Le soleil est énorme, il descend sur la mosquée et sur la station. C’est la joie.

Et cette station fait hôtel et restaurant. Repas et douche la même journée, voilà qui va nous réparer et nous permettre d’arriver demain à la frontière sans trop de souffrance.

Allez j’éteins la lampe et je pars vers d’autres formes de nuages.

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